jeudi 13 novembre 2014

La pyramide inversée, technique d'écriture

La pyramide inversée, technique d'écriture

La pyramide inversée est un principe de rédaction qui consiste à aller droit au but : le rédacteur ou journaliste décide de révéler directement l’essentiel de l’information. Il choisit consciemment de traiter les détails plus tard dans le texte. Les statistiques de lecture encouragent une telle approche.



Dans ce dossier :

  1. Un tutoriel vidéo sur la pyramide inversée
  2. La pyramide inversée améliore les taux de lecture
  3. L'écriture en pyramide inversée renforce votre référencement
  4. Les défis à relever face à la culture d'entreprise
  5. Une solution pour le rédacteur : la technique des 5W
  6. Testez vos accroches avec notre module interactif !

Tutoriel vidéo

Améliorer les taux de lecture

L’efficacité de la pyramide inversée est scientifiquement validée. Une étude du Nielsen Norman Group indique que 81% des internautes lisent, en moyenne, le premier paragraphe, contre 32% seulement pour le quatrième paragraphe.
Nous assistons à une réalité cruelle : le décrochage progressif des lecteurs au sein d’un article.
Statistiques de taux de lecture en fonction de la profondeur du paragraphe

Traduction : si vous placez une information importante trop loin dans le texte, elle risque de totalement échapper à la moitié des gens.
Cette autre étude du Nielsen Norman Group mesure le temps d’attention accordé au haut de page.
Il apparaît que les internautes ne consacrent que 19,7% de leur temps à explorer les contenus sous la ligne de flottaison.

Temps de lecture au-dessus de la ligne de flottaison

Faut-il en conclure que les internautes ne lisent pas les pages longues ?


Absolument pas !
Une étude menée par ClickTale nous apporte des données fort intéressantes sur la manière dont les internautes abordent les longues pages (le comportement de « scrolling »).
Cette étude révèle que les internautes explorent les pages indépendamment de leur longueur. Une page de taille moyenne n’a pas plus de chances d’être lue de bout en bout qu’une page longue.
Pourcentage de lecture en fonction de la taille de la page web

Ce qui détermine l’envie d’explorer, c’est la force du haut de page. Un texte rédigé en pyramide inversée augmente ses chances d’être lu dans sa totalité.
Vous pensiez réserver les meilleurs morceaux pour la fin ? Assumez alors le risque d’un décrochage prématuré du lecteur.

Les taux de clic sont supérieurs dans le haut de page.


Ci-dessous, Google Analytics calcule le taux de clic sous la ligne de flottaison.
Seuls 23% des internautes, dans notre exemple, explorent un lien plus bas dans la page. C’est dire l’importance de la pyramide inversée dans une page d’accueil d’une certaine longueur. Les contenus placés trop bas sont fortement sous-exposés.

Taux de clic sous la ligne de flottaison

Chez certains de nos clients, le taux de clic sous la ligne de flottaison tombe sous la barre des 5%.

Faible taux de clic de la partie profonde de la page

Cette tendance du lecteur à concentrer son attention sur l’information en amont est généralisable :
  • Le début d’un paragraphe conditionne fortement son taux de lecture.
  • Les douze premiers caractères d’un titre absorbent la première fixation oculaire et constituent un véritable hameçon.
En tant que rédacteur, vous veillerez donc à propulser en tête de titre ou de paragraphe les mots les plus consistants et les plus révélateurs du sujet abordé.

Le web mobile amplifie la nécessité d’une écriture en pyramide


Sur les écrans d’ordinateur de bureau, plusieurs lignes de texte sont affichées, laissant à lire d’emblée une quantité d’information consistante.

Un article du groupe Norman en affichage Desktop
Un article du Nielsen Norman Group en affichage « desktop ».

Sur le Web mobile, la quantité d’information affichée au-dessus de la ligne de flottaison est nettement réduite.
Dans notre exemple, c’est l’écriture en pyramide inversée (le « Summary » de Jakob Nielsen en haut d’article) qui sauve la mise et permet de saisir immédiatement le message principal. Le taux de lecture du reste de l’article n’en est que plus élevé.

Un article du groupe Norman en affichage Smartphone
Le même article en affichage « smartphone ».


Faire remonter vos mots clés


À l’unanimité, les référenceurs s’accordent pour dire que Google donne plus de poids au haut de page dans sa mécanique d’indexation. Ce phénomène porte le nom de « keyword prominence ». Les mots clés situés dans la première partie de la page impactent davantage les moteurs de recherche que les mots clés placés plus loin dans la page.
Notez que la proéminence des mots clés n’est pas uniquement liée à la position dans la page. Elle est également le fruit de mises en avant physiques (comme des mots graissés, par exemple) et surtout sémantiques (les titres, sous-titres et métadonnées).
Dites-vous bien que le moteur de recherche a tout intérêt à desservir des pages rapidement perçues comme pertinentes. Or, c’est la partie haute de la page qui crée l’expérience à l’atterrissage. Ce que les ergonomes appellent la « rhétorique d’arrivée » pèse lourd dans la qualité perçue du moteur de recherche.
Pas étonnant que lorsque vous analysez les pages de résultats les mieux positionnées, vous y retrouvez très souvent les mots clés recherchés dans les zones titres ou les tout premiers mots.

Au-delà de combien de mots Google se désintéresse-t-il de votre contenu ?


Sont-ce les 20, 30, 100 ou 200 premiers mots qui pèsent le plus sur le SEO ? Il est très tentant de formuler la question de cette manière, mais cela reste un fantasme de consultant en recherche de recettes de cuisine.
De fait, les conseils varient énormément sur la toile :
  • clickxposure.com: « It is recommended to insert the keyword phrase in the first 10 words of the document’s body text. »
  •  searchenginejournal.com: « Having a keyword appear in the first 100 words of a page’s content appears to be a significant relevancy signal »
  • bruceclay.com: « Knowing that the spider will often try to figure out your theme within the first 200 words of your site you would want them to see the relevant text as soon as possible.

Sans tomber dans l’obsession arithmétique, le rédacteur qui rédige en pyramide inversée sera amené à injecter les mots clés essentiels, révélateurs du thème traité, dès l’amorce du texte. Si possible dans le premier paragraphe, comme le suggère Noël Nguessan, auteur de « L’essentiel du référencement web », sur la communauté Google+ Stratégie de contenu.

Les premiers niveaux du site sont mieux indexés que les pages profondes


La pyramide inversée s’applique également à l’arborescence du site : les niveaux les plus élevés (proches de la page d’accueil du site) sont, en moyenne, davantage explorés et mieux indexés.
Comment fonctionnent les moteurs de recherche ? Leurs robots, appelés « crawlers », suivent les liens de la toile, explorent les sites web en vue d’en indexer le contenu. Cependant, pour agripper les millions d’informations qui circulent dans le monde à chaque seconde, dites-vous bien que les robots doivent gérer leur énergie. Ils choisissent de se concentrer prioritairement sur les premiers niveaux.
Ci-dessous, observez comme les pages profondes ont moins de chances d’être « crawlées » par le moteur de recherche.

Les pages profondes ont moins de chance d'être crawlées
Répartition inspirée d’une étude de cas de botify.com


Les défis à relever dans votre entreprise

À première vue, le principe de rédaction en pyramide inversée paraît simple et de bon sens. La réalité démontre cependant qu’une telle approche reste loin d’être naturelle pour tous.

Obstacle n°1 : Les juristes


Le langage des juristes

« Attendu que, attendu que… »
« En vertu du règlement 29 bis… »
« Conformément aux dispositions législatives en vigueur… »
« Avertissement juridique : nous attirons votre attention sur… »
Faut-il encore vous convaincre que la syntaxe juridique ne rime pas avec la pyramide inversée ?
Une tendance est manifeste et encourageante : plus les sites web d’institutions publiques gagnent en maturité, plus ils acceptent de reléguer les précautions juridiques dans les tréfonds des pages. La loi oblige rarement les sites web à être aussi explicites que les paquets de cigarettes.

Obstacle n°2 : Les scientifiques


« Partant de l’hypothèse que… »
« Sur base d’observations effectuées durant la période de… »
D’hypothèse en synthèse, de déduction en conclusion, le scientifique déroule son raisonnement de manière linéaire. Il aime la précision et verra parfois la pyramide inversée comme une tentative de vulgarisation abusive.
Pour les scientifiques comme pour les juristes, la solution consiste à rappeler qu’une communication en pyramide inversée sert à accrocher le lecteur, mais qu’elle n’exclut en rien la rigueur et la précision dans la suite du document. Un lien vers le texte de loi complet ou l’étude dans son intégralité reste une solution élégante pour les utilisateurs et rassurante pour les spécialistes.

Obstacle n°3 : Les protocoles


« Tout d’abord, nous tenons vivement à remercier… »
« Bienvenue à tous et toutes sur ce nouveau site web… »
« Ce projet n’aurait pas vu le jour sans la collaboration de… »
Le lecteur s’intéresse au sujet, moins à son auteur, qui se verra mieux mis en valeur en signature, après service rendu. Une certaine forme d’égocentrisme ou de goût trop prononcé pour la hiérarchie conduit à des contenus peu centrés sur les utilisateurs.
Ci-dessous, qu’est-ce qui intéresse le plus le citoyen français ? La vidéo de la dernière séance publique ou bien le curriculum vitae du président de l’assemblée ? La réponse fera unanimité. Pourtant, c’est le président qui occupe le haut de la pyramide inversée, au-dessus de la ligne de flottaison.
Hiérarchisation de l'information sur le site officiel de l'Assemblée Nationale de France
Source : www.assemblee-nationale.fr (2010)
NDLR : Le site a évolué entre-temps.

Obstacle n°4 : L’école


À l’école, le plan de rédaction par excellence reste celui-ci : « introduction-développement-conclusion ».
Les Anglo-saxons voient les choses différemment et écriront volontiers « to-the-point », mais le francophone aime la prose et les introductions.
L’entreprise se laisse souvent piégée par cette pseudo nécessité d’introduire en grandes pompes son sujet. Ci-dessous, l’introduction aux offres d’emploi chez Partena sonnera comme un ronron « ressources humaines » complètement ennuyeux et interchangeable avec d’autres entreprises. Les utilisateurs viennent consulter les annonces. Elles constituent le buffet. Le discours en haut de page fera l’effet du discours avant le buffet. Celui qui donne envie de quitter la salle.

Offres d'emploi sur le site Partena
Source : www.partena.be (2010)
NDLR : Le site a évolué entre-temps.

Obstacle n°5 : Le mythe de l’effet de surprise


De nombreux rédacteurs pensent, à tort, que maintenir le suspense peut donner envie au lecteur de poursuivre la lecture.
Ci-dessous, le haut d’article se perd en tirades ampoulées et abstraites sur le concept d’innovation. Annoncer d’emblée le sujet de cet article, très concret, nous semblerait bien plus accrocheur : « Rolls Royce sort une application iPhone ».

Article appli Rolls Royce

Comme dans la plupart des métiers, le piège réside dans le fait de se faire plaisir plutôt que de penser au lecteur. Laissez à Amélie Nothomb ou feu George Simenon le loisir de jouer du mystère. Pour le bien de votre contenu d’entreprise, adoptez un style plus direct.
Avec une écriture en pyramide inversée, vous êtes certains de la satisfaction de vos lecteurs. Soit le sujet les intéresse et ils plongeront avec enthousiasme dans les profondeurs de l’article, soit le sujet ne les intéresse pas et vous aurez eu l’élégance de ne pas leur faire perdre de temps.

Une solution pour le rédacteur : les 5W

La pyramide inversée amène le rédacteur à prendre conscience de son plan de rédaction. Tous les professionnels de l’écriture vous le rappelleront : avant de penser écriture, il faut penser structure. Quelles seront les idées clés de votre article et dans quel ordre déciderez-vous de les enchaîner ? Telle est la question.
La technique des 5W, enseignée aux journalistes, est très complémentaire à la pyramide inversée. Elle consiste à répondre, dès le chapô de l’article, aux questions essentielles :
  • Who ? Qui est concerné ?
  • What ? Que se passe-t-il ?
  • Where ? Où cela se passe-t-il ?
  • When ? Quand cela se passe-t-il ?
  • Why ? Pourquoi ? Quelle est la motivation ou l’enjeu ?
Pour en savoir plus sur les techniques d’écriture professionnelles, lisez également cet article : « Les techniques journalistiques en ligne ».

Le bas de page : entité négligeable ?


Après tout ce qui vient d’être dit et notre insistance à valoriser l’information la plus consistante dans la partie haute, vous pourriez en venir à négliger la partie basse de la page.
Ce n’est pas ce que nous vous conseillons. La force de l’accroche sert à conduire le lecteur vers les détails. Les personnes intéressées par le sujet annoncé apprécieront la précision, les nuances, les exemples, et tout ce qui fait la richesse d’un traitement approfondi.
Les articles longs ont un potentiel de référencement supérieur aux articles courts. Ils génèrent davantage de liens entrants et basculeront plus facilement dans les favoris.
Les détails comptent et font la différence, pourvu qu’ils n’alourdissent pas l’amorce.

Testez la pyramide inversée !

Les premiers mots sont un hameçon. Testez ici la force de vos accroches !
Alors, quel est votre verdict ? Le début de votre texte contient-il l’essentiel ?

ENCODEZ OU COLLEZ
VOTRE TEXTE DANS CETTE PYRAMIDE !!!
 
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